Les expatriations se suivent… et se ressemblent ! Je ne sais pas si vous vous souvenez mais après mon arrivée au Canada en 2017, j’avais écrit l’article “PVT Canada – Pourquoi j’ai démissionné du poste de mes rêves au bout d’un mois?“. Eh bien cette fois-ci, on se retrouve avec un article un peu similaire, sauf que cette fois-ci je ne suis pas restée un mois, ni une semaine, ni une seule journée ! Je ne suis pas allée travailler lors de mon premier jour !
Certains doivent penser que je suis une fille compliquée, mais je vous assure que je ne le suis pas. Je suis une travailleuse acharnée et passionnée par mon métier d’hôtelière. Malheureusement, on fait parfois face à des situations compliquées et il faut savoir prendre des décisions, et c’est ce que j’ai fait !
Expat en Angleterre : pourquoi je ne suis pas allée au travail pour mon premier jour?
3 mois avant notre expatriation en Angleterre
On était en juillet, on habitait encore à Montréal mais j’avais décidé de prendre les devants niveau emploi. J’ai donc envoyé mon CV à mon hôtel préféré de Sheffield. Deux heures après l’envoi de mon CV, le chef de réception m’appelle ! :-O Je ne m’y attendais tellement pas, j’étais super heureuse ! On fait un entretien de 45 minutes au téléphone et tout se passe comme sur des roulettes.
Durant cet entretien, il me parle de Sheffield, de l’hôtel, de ses employés, de l’ambiance qui y règne. Je suis sous le charme ! On parle ensuite salaire (le SMIC anglais), puis horaires (40h/semaine), et des jours de repos (2 jours consécutifs mais pas souvent les samedis et dimanches). À entendre ces conditions de travail, rien ne me choque. En effet, l’hôtellerie est un métier de passion, il est rare qu’on ait nos week-end, et on est souvent payé la misère, mais c’est pas grave puisque c’est le métier que j’aime. De plus, je sais que j’aurai sûrement de belles opportunités professionnelles dans ce groupe hôtelier.
Quelques jours plus tard, il me rappelle pour me dire que si je le souhaite, le poste est pour moi et je commencerai le 14 octobre, comme on avait discuté au téléphone. Je suis super heureuse et j’accepte. Nous voilà rassuré car Jordan a déjà son poste qui l’attend en Angleterre et moi aussi maintenant. On a donc moins à stresser sur le plan financier et professionnel 🙂
Notre première semaine à Sheffield
Dès notre arrivée à Sheffield, je m’empresse le deuxième jour d’aller à mon futur travail ! J’y rencontre mon manager (avec lequel je communique par WhatsApp depuis des mois), je rencontre quelques collègues, je visite l’hôtel. Mon manager est très accueillant et chaleureux mais je me sens un peu mal à l’aise avec lui. Je le trouve beaucoup trop gentil avec moi, mais je mets ça sur le coup de notre nouvelle expatriation et que c’est pas la même culture. J’essaie l’uniforme pour voir s’il me va, j’achète des nouveaux escarpins, je suis prête et j’ai vraiment hâte d’attaquer ma première semaine dans cet hôtel !
Durant la semaine, je demande à mon manager qu’il m’envoie le planning car j’en ai besoin pour m’organiser dans notre installation. À chaque fois il me sort une excuse différente : il n’a pas le planning avec lui, il a oublié de le photographier au travail, il ne s’en souvient plus… Bref, je suis dans le flou. Je sais que je commence à 8 h le lundi mais je n’ai aucune idée de mes jours de repos ou de mes horaires.
Il faut savoir que dans l’hôtellerie, on travaille généralement sous forme de shifts : matin (7h à 15h), soir (15h à 23h) ou nuit (23h à 7h). C’est d’ailleurs le mode de fonctionnement de cet hôtel. J’ai impérativement besoin de connaître mon planning puisque je récupère les clés de notre appart la semaine suivante.
J-1 - Je reçois enfin mon planning!
La veille de mon premier jour, à 17 h, je reçois enfin le planning de ma première semaine. Et là, c’est la douche froide !
J’ai bel et bien mes deux jours de repos consécutifs le mercredi et jeudi. Mais mon nombre d’heures de travail lui, s’élève à 58 heures!!!
Oui vous avez bien lu, je travaille 58 h pour ma première semaine ! 58 h en 5 jours de travail, ce qui nous fait une moyenne de 11 h 30 de travail par jour. En gros, mon horaire est 8 h à 20 h tous les jours sauf mon 1er jour où je fais “seulement” 8 h à 18 h.
Je m’écroule et je pleure toutes les larmes de mon corps. Je ne comprends pas. Voilà plus de 3 mois que je communique avec cet homme, qu’il m’a expliqué 100 fois que j’allais faire du 40h/semaine, et là je me retrouve avec 58 h pour ma première semaine !
Bien sûr, si j’étais la patronne de l’hôtel, ou que c’était ma propre entreprise, 58 h ça ne me ferait pas peur. Mais là, en tant que salariée payée au Smic, à être debout toute la journée à la réception (et mes problèmes de jambes), c’était hors de question !
Je suis un hôtelière passionnée, mais je ne suis pas une esclave!
Il est 18 h, je suis supposée commencer le lendemain à 8 h, et me voilà perdue. J’essaie de peser le pour et le contre, je me dis qu’il y a sûrement une raison au fait que je fasse autant d’heures pour ma première semaine. Mais je vois rapidement que tous mes autres collègues font entre 50 h et 60h ! C’est quoi cet hôtel de fou???!!
J’avais fondé tellement d’espoir dans cet hôtel, j’avais tellement d’objectifs de carrière, je me voyais déjà grimper les échelons et avoir un poste à responsabilité d’ici quelques mois. Tous mes espoirs s’envolaient.
J’ai contacté ma famille, mes amis hôteliers, mes anciens managers d’hôtel, et j’ai demandé leur avis pour essayer d’y voir plus clair. Finalement, je me suis couchée, fatiguée de tout ça.
La nuit porte conseil
Au réveil, tout était devenu limpide : je n’irai pas travailler à cet hôtel !
Comme je l’écrivais ci-dessus, j’étais prête à travailler et me donner à fond pour ce job qui me passionne, mais je ne voulais pas y perdre ma santé, ni ma passion, ni mon temps !
Je m’expatrie à l’étranger pour avoir le temps de découvrir le pays dans lequel je vis, pas pour passer 60 h au travail par semaine.
Alors certes, peut être que cette semaine en particulier, le manager n’avait pas le choix que de me faire travailler 58 h, peut-être que d’autres employés étaient en vacances, peut-être que l’hôtel était sous staffé. Mais dans le fond, ce n’est pas ces 58 h qui m’ont blessé, c’est surtout le fait que j’avais complètement perdu confiance en l’entreprise et en mon manager.
Je me suis sentie “trahie” par ce manager, qui ne m’avait pas dit toute la vérité. C’est pourquoi j’ai préféré ne pas rester dans une entreprise dans laquelle je n’avais pas confiance en mon responsable.
Je suis allée leur dire que je ne restais pas
J’avais vraiment peur d’annoncer ma décision au manager. J’avais peur de sa réaction, mais après tout, avait-il pensé à la mienne ?
J’ai décidé d’assumer jusqu’au bout ma décision, et je suis allée à l’hôtel à 8 h, pour leur dire que je ne resterai pas.
Croyez-moi que je n’ai jamais eu autant de stress et mal au ventre de toute ma vie ! C’est la première fois de ma carrière que je prenais une telle décision ! Faire une croix sur un CDI pour préserver ma santé physique et mentale. Mais j’avais l’intime conviction que c’était le bon choix à prendre.
Je suis donc entrée dans l’hôtel, j’ai vu une employée (qui était toute contente de m’accueillir !), et je lui ai dit que je ne resterai pas. Je lui ai dit combien j’avais été choquée du nombre d’heures, que ce n’est pas ce qui était prévu, et que je n’étais pas venue en Angleterre pour me tuer au travail et finir en burn-out.
Elle m’a écouté, ne savait pas trop quoi répondre. Je l’ai remercié, je me suis excusée de ne pas venir travailler chez eux (la pauvre elle allait sûrement se prendre encore plus d’heures de travail !). Et je suis partie.
Une heure plus tard, le manager me rappelle
Il était choqué de ma réaction, il ne comprenait pas.
Je lui ai expliqué mes raisons. Il essaie de me récupérer en me proposant un contrat officiel de 40 h à 43 h par semaine. Je refuse. Il m’a trahie une fois, je n’ai pas envie de remanger de la merde.
D’un ton cordial et sec, j’ai mis fin à la conversation, je lui ai souhaité le meilleur dans sa vie, et j’ai raccroché !
La morale de cette histoire
La morale, c’est qu’il faut écouter son cœur et ses envies. J’aurai pu aller travailler là-bas, mais au bout de quelques semaines, j’aurai sûrement fait une dépression ou un burn-out. Est-ce que ça en valait vraiment la peine ? Un membre de ma famille proche a fait un burn-out en 2019, et j’ai l’impression qu’on ne voit pas tout ce mal être se mettre en place. Ça se fait petit à petit, et un jour, on n’a plus envie de se lever. Je ne voulais pas en arriver là, surtout pour un smic !
C’est pas parce qu’on est “immigré” qu’il faut se laisser faire et accepter n’importe quelle condition de travail. Je sais que malheureusement, certains immigrés n’ont pas le choix sur le point financier. Croyez-moi que moi non plus je ne roulais pas sur l’or à ce moment-là mais j’ai choisi de préserver ma santé avant tout.
→ Pour l’anecdote : quelques mois plus tard, j’ai fait de nombreuses rencontres à Sheffield dont une fille qui avait travaillé à cet hôtel, et qui n’était restée qu’une semaine ! Elle m’a dit que ce manager était un véritable fou, que tout le monde le détestait, qu’aucun employé ne restait plus de 2 semaines, que l’ambiance était pas bonne du tout !
Comme quoi, j'ai bien fait de suivre mon coeur et mon instinct!
Et voilà, c’était le résumé de mon début professionnel en Angleterre, très chaotique, mais maintenant ça va beaucoup mieux pour moi ! Trois semaines plus tard, j’ai trouvé un poste dans un autre hôtel et celui-ci respecte ses salariés ! 😉
N’hésite pas à partager dans les commentaires si toi aussi tu as vécu des moments de doutes sur le plan professionnel lors de ton expatriation à l’étranger ! Ça pourra sûrement aider d’autres lecteurs 🙂
Pauline pour Soif de Voyages
6 commentaires
Tu as tellement eu raison de ne pas faire ce taff. 58 h par semaine au SMIC ? non mais la blague.
Et rien que le fait que le manager n’ait pas le planning à plusieurs reprises… hum, c’est déjà moyen je trouve
En tous cas c’était “ballsy” et très pro de t’y rendre pour annoncer ta décision ! Bravo !
Je t’avoue que j’ai jamais eu autant la boule au ventre, mais au moins, je peux me regarder dans la glace et j’ai assumé jusqu’au bout ma position 🙂 Merci à toi en tout cas, ça fait plaisir de voir que d’autres personnes pensent la même chose 🙂
Sa me fait un peut penser à mon expérience comme aupair. Un contrat avait été établi avant mon arrivé, mais malheureusement la famille n’y faisait pas attention. C’est tellement frustrant comme situation, surtout quand on est dans un autre pays.
Tu as bien fait de tenir ton point et de ne pas y retourner.
Merci pour ton message. Oui en effet, c’est vraiment difficile, surtout quand on est pas dans notre pays de naissance et qu’on ne connait pas toutes les règlementations :/
Tu as eu raison de ne pas accepter ce poste, c’est dingue de proposer ce genre de contrat. Il me semble que légalement le temps de travail hebdomadaire ne peut pas dépasser 48h (ou quelque chose comme ça).
Merci beaucoup Lucie 🙂 Et bien c’est ce que je pensais aussi. Puis en lisant les lois, il s’avère qu’il ne faut pas travailler plus de 48h par semaine en lissant les heures sur 6 semaines je crois. Donc on peut faire 60h la première semaine et 36h la suivante, c’est correct tant que la moyenne ne fait pas 48h. Enfin bon, quoi qu’il en soit c’était abusé !